Quand essaiment les maçons de Grange-Neuve venus des Combrailles et du Velay: l'exemple des Garnier

Dans le dernier numéro des Carnets d’Usson , Yvette Debard a présenté nombre de maçons, maîtres ou garçons, venus, des Combrailles ou du Velay, travailler, voire s’établir, à Usson, aux XVIIe et XVIIIe siècles, ainsi qu’au début du XIXe. Elle y a montré combien le hameau de Grange-Neuve est devenu, grâce à l’installation de plusieurs d’entre eux, un village de maçons en mettant en exergue la « dynastie » Pomerol : à Pierre, maître maçon originaire de Charensat en Combrailles, ont succédé, dans la même activité et au même lieu, son fils Charles et le mari de sa fille Françoise, Jean-Claude Garnier – sur lequel on va revenir –, puis son petit-fils Jean Pomerol et le mari de sa petite-fille Julie Pomerol, Jean-Baptiste Colombet, enfin son arrière-petit-fils Auguste Pomerol. Aussi Yvette Debard soulignait-elle : « Il est sans doute rare de trouver une famille où le métier de maçon se perpétue sur au moins quatre générations et avec plusieurs maçons pour certaines »

Elle ne pouvait imaginer que le métier de maçon s’était perpétué, dans cette famille, plus longtemps encore ! Ce sont les hasards de la recherche historique qui, en conduisant nos pas vers le couple formé par Françoise Pomerol, fille de Pierre, et son mari, Jean-Claude Garnier, viennent de démontrer que la « dynastie » Pomerol se complétait d’une « dynastie » Garnier, d’abord à Usson pendant un peu plus de deux décennies, ensuite à Saint-André-de-Chalencon, en Haute-Loire, à une douzaine de kilomètres au sud d’Usson, durant quelques années, enfin – et surtout – à Rozier-Côtes-d’Aurec, dans la Loire, à quelque vingt kilomètres à l’est d’Usson, pendant presque un siècle. En voici les principaux membres.

I.- Jean-Claude Garnier et Françoise Pomerol, d’Usson à Saint-André-de-Chalencon et à Rozier-Côtes-d’Aurec

1.-A Usson

Si Yvette Debard signale que Françoise Pomerol, fille de Pierre, a épousé, à Usson, en 1814, Jean-Claude Garnier, maçon de Grange-Neuve, elle n’indique pas l’origine de celui-ci. Il est vrai qu’elle ne le peut, l’acte de mariage étant muet sur ce point. Les actes de naissance des enfants dudit couple enregistrés à Usson, au nombre de sept (Antoine, 1er mai 1813 ; Jeanne-Marie, 5 janvier 1815, laquelle décèdera le 18 janvier 1816 en étant prénommée à cette occasion Marie-Victoire ; Charles, 21 octobre 1816 ; Benoît, 9 novembre 1818 ; Marguerite, 5 novembre 1820 ; Anne, 6 janvier 1825 ; Pierre, 24 mars 1827), ne donnent pas plus d’information à ce sujet, même si la déclaration du second enfant surprend quelque peu, tant par sa date (11 janvier, soit six jours après l’accouchement !) que par l’identité du déclarant, qui aiguille vers une orientation inattendue (un certain Claude Gerphagnon, cultivateur à Saint-Maurice-de-Lignon, en Haute-Loire, lequel se marie à Usson quelques mois plus tard et, à cette occasion, est dit maçon, demeurant au village de Cublaise, commune de Saint-Maurice-de-Lignon). Il en va de même des actes de naissance des enfants de ce couple nés à Saint-André-de-Chalencon, au nombre de deux (Jean, 12 avril 1829, lequel mourra le 23 dudit mois ; Marguerite, 18 juillet 1830), puis à Rozier-Côtes-d’Aurec, au nombre de deux également (Jeanne, 17 juillet 1833 ; Antoine, 16 août 1836) ...


Une famille de maîtres chapeliers à Usson pendant plus d'un siècle

C'est aux environs de 1650 que des actes notariés commencent à mentionner la présence, à Usson, de chapeliers, et, en particulier une famille que l'on peut suivre jusqu'à la fin du XVIIIe siècle et qui semble être restée tout le temps dans la même maison.

C'est la même famille bien que le nom change à presque chaque génération, le métier ne s'étant pas transmis de père en fils mais de père en gendre.

Les archives notariales d'Usson et de Saint-Pal, les registres paroissiaux et les documents cadastraux vont permettre de retrouver ces maîtres chapeliers, leur maison et quelques renseignements concernant leur métier et leur vie à Usson.

Les maîtres chapeliers et leur famille

Jacques Guesle
C'est le plus ancien que les archives nous ont permis de retrouver à Usson. Il est qualifié de « maître chappellier habitant à Usson », le 25 juin 1653, lorsqu'il achète, avec Marie Crozet, sa femme, une maison dans le bourg.
Son nom est orthographié Guesle ou Guelle ou Guele suivant les documents.
Une vingtaine d'années plus tard, on trouve, cité comme témoin dans un acte de 1672, Claude Guesle, chapelier à Usson, qui signe.
Encore presque vingt ans et, en 1693, un autre Claude Guesle se marie à Viverols où il est chapelier.
Peut-être y a-il un lien entre eux mais les rares documents les concernant ne permettent pas de le trouver.

Louis Rouchouse
On le trouve cité dès 1662, le 29 décembre, date à laquelle il passe un contrat avec un futur apprenti, il y est qualifié de « maître chapelier ».
La naissance d'une de ses filles, le 1er avril 1684, permet de le rattacher peut-être à Jacques Guelle :
«Aujourd'hui, 1er avril 1684, est née Marie Rouchouse et a esté baptisée le 2è dudit mois, fille naturelle et légitime à Louys Rouchouse et à honneste femme Madelaine Guele. Le parrain Benoit Rouchouse, la marraine Catherine Rouchouse, ses frère et sœur dudit lieu d'Usson ... » 
L'épouse du maître chapelier Louis Rouchouse porte donc le même nom que le maître chapelier Jacques Guelle. De plus, au décès de celle-ci, le 15 septembre 1719, le curé Paulzes note :
« ...a esté enterrée Magdelaine Guesle du lieu d'Usson, agée d'environ septante cinq ans ... ».
Elle serait donc née vers 1644 et pourrait bien être fille de Jacques Guelle qui est cité en 1653, mais, là encore, les documents manquent pour pouvoir le prouver.
L'acte de baptême précédent nous montre que Louis Rouchouse et Madelaine Guesle ont eu au moins trois enfants : Catherine, Benoit et Marie.
Le 9 juin 1700 « est décédé Me Louys Rouchouse... », sans plus de renseignements.

Jean-Baptiste Mouton
Le 15 juin 1689, le maître chapelier Louis Rouchouse marie sa fille :« Aujourd'huy, 15è juin 1689, après les trois publications faites en mon prosne de grand messe, ne m'ayant parut aucun empeschement canonique, j'ay donné la bénédiction nuptiale à Jean-Baptiste Mouton, fils à Claude du lieu d'Usson, et à Catherine Rouchouse, fille à Louis, maistre chapelier dudit lieu d'Usson ... » ...


La septième borne Forez-Auvergne

« Septima meta posita est citra lo Tremoley a parte d'Ussom, prope quoddam pratum, que quidem meta recte concernit quoddam sacsum grossum naturale situm subtus dictum mansum del Tremoley a parte orientali, juxta viam qua tenditur de Vivayrolhia apud Estivallelhes
La septième borne est posée en deçà du Trémolet du côté d'Usson, près d'un pré, et elle se mêle parfaitement au gros rocher naturel situé sous ledit manse du Trémolet, côté est, tout près de la voie qui va de Viverols à Estivareilles.

Et la vérification ultérieure des bornes nous indique:
... et ad dicto loco eundo rectum iter usque ad magnum saxum sive rocha que est ultra lo Tremolet, a solis ortu …
C'est à dire … tout droit du lieu précédent au grand rocher ou roche qui est au delà du Trémolet côté est …

Tous ces renseignements ne semblent pas permettre le doute car il existe toujours un gros bloc de roche au bord du chemin de Viverols à Estivareilles à l'est du Trémolet, même si ce rocher a diminué ces dernières années pour élargir le passage. Le fait que le texte dit que la borne se mêle au rocher pourrait signifier que la marque du bornage était portée sur lui, le plus souvent par une croix au sommet comme sur la borne précédente.

La toponymie proche est la suivante:

A557 c'est le Communal du Trémolet (1) une pâture, un four à poix et un lavoir
A555 / 556 la Quoire (2)et 561 la Roche (4) rappellent notre borne – rocher
A560 du Fiacre (3) évoque la diligence qui passait l'Ance à Cohandes et plus anciennement dans notre texte, la voie dite de Viverols à Estivareilles.

Mais, non loin de là, derrière le lavoir, un autre bloc de roche postulerait. Il a la forme arrondie d'une borne même si on ne devine pas davantage de croix parmi les fissures du temps de son sommet. Le texte latin nous disait: « … prope quoddam pratum … juxta viam ... » Le second bloc est au milieu des prés mais le premier est plus près d'une voie.

L'histoire ancienne du Trémolet

En 1288, il est fait mention de Japines de Tremolen comme débiteur d'un bourgeois montbrisonnais, Pierre Alaysson.
En 1331 et 1333 magister Matheus Regis, jurisperitus avoue au comte de Forez en fief lige, d'ancienneté, un cens en argent, seigle et avoine sur son tènement del Tremolein dû par Jacques del Tremolen filiâtre de Petrus del Tremolen que omnia acquisivit idem Matheus a domino d'Uczom …
En 1334, 1341 et 1357, les seigneurs d'Usson avoue le manse du Trémolet au comte de Forez.
En 1395, un demi-siècle après notre texte, Bellonde de Langeac …