Le corps de garde

Au hasard de la consultation des anciennes archives notariales d’Usson, il est parfois possible de dénicher un détail inespéré. C’est ainsi que , parmi les actes de Me Sigean, notaire à Usson, se trouve une transaction, datée du 19 novembre 1736, entre demoiselle Antoinette Daurelle, veuve de sieur Caprais Porrat, et Guillaume Giraud, maître maréchal, au sujet d’un jardin situé dans le bourg d’Usson. L’acte en précise les confins : l’un d’eux est un « coin de maison appelé le corps de garde ».

Ainsi, ce document, à priori assez banal, contient mention d’un élément peut-être intéressant pour retrouver des vestiges du bourg médiéval d’Usson. Il reste à le localiser précisément, à trouver si possible confirmation de cette appellation et à examiner si sa présence se justifie à cet endroit. Ce sera l’objet de cet article.

Deux documents mentionnent le corps de garde :

La transaction de 1736 (AD 42 : 5 E-VT 1150-46 Me Sigean notaire à Usson)

Voici la transcription de l’essentiel de cet acte :« Fut présente demoiselle Antoinette Daurelle, veuve de sieur Caprais Porrat, vivant bourgeois, habitante d’Usson, laquelle délaisse à titre de rente foncière.... à Guillaume Giraud, Me maréchal habitant audit lieu d’Usson, environ demy couppe de jardin où ledit Giraud a déjà fait construire une maison et boutique de l’adveu et consentement de ladite demoiselle Daurelle et dudit deffunt son mary ainsi qu’elle le reconnaît, joignant de matin la rue publique dudit lieu, de midy le jardin du granger de Mr de Vertamy, de nuit et bize le surplus du jardin et coin de maison appelé le corps de garde , appartenant à ladite demoiselle Daurelle. .......... Fait et passé audit lieu d’Usson, le 19e novembre 1736 après midi, en présence d’Antoine Lafarge, marchand boucher et d’Antoine Fourcheygut, journalier, habitants d’Usson. »

Une vente de 1747 (AD 42 : 5 E 1686 Me Rousset notaire à Saint-Pal-en-Chalancon)

Le 17 juillet 1747, les héritiers d’Antoinette Daurelle, qui est décédée le 20 octobre 1743, vendent certains de ses biens qui sont situés à Usson côté d’Auvergne dont « un petit bâtiment restant et jardin y attenant, appelé vulgairement le corps de garde, couvert à tuiles, le tout contenant environ trois quarts de couppe ... » à Pierre Martin, cordonnier à Usson, et Françoise Granjon sa femme. Les confins sont donnés ainsi: de matin la rue publique et la maison de la veuve de Guillaume Giraud, de midi le jardin de M de Vertamy et la maison de la veuve Giraud, de soir et bize le jardin et basse-cour de sieur Pierre Charet

Une première localisation

Ces deux actes vont permettre de situer, dans le bourg, le quartier où se trouvent ces maisons et jardins : Tout d’abord, d’après le deuxième document, ils sont situés côté d’Auvergne, donc à l’ouest de la grand rue. Ensuite, dans les deux textes, le jardin de M de Vertamy, ou de son granger, est donné comme confins, il est donc important de le situer : « M de Vertamy », à cette époque, désigne Alexandre de Vertamy dont le domaine est ensuite passé à son fils, Jean-Claude de Vertamy, puis au gendre de ce dernier, Louis Antoine de Goys ou Degouis (Voir les Carnets d’Usson, Hors Série n°2 : « Le manoir Vertamy »). Les documents cadastraux de 1824 montrent que, côté Auvergne, leurs terrains se situaient dans la partie sud du bourg. Le quartier à étudier se trouve donc entre la route de Craponne et la rue du Bachat (ancienne route de Viverols) ...


L’étonnante destinée de Gabrielle Verdier

A sa naissance, le 3 février 1724, ses parents, Jacques Verdier et Marie Chataing, laboureurs d’Usson, lui donnent pour parrain Jean Tournier, marchand, et pour marraine demoiselle Gabrielle Daurelle . A son baptême sont présents sieur Jean-Baptiste Sigean, notaire royal, et Jacques Tournier. A ce moment-là, aucun d’eux, sans doute, ne devait se douter que Gabrielle aurait une vie bien peu courante pour l’époque. En effet, les cinq mariages qu’elle va successivement contracter à partir de sa vingtième année sont assez inattendus : d’abord par leur nombre, mais surtout par la diversité de la provenance des époux et l’originalité de leur profession.

Tout d’abord, un maçon creusois

Le 27 juillet 1744, elle a vingt ans depuis quelques mois, et, sous l’autorité de sa mère, déjà veuve, un contrat de mariage, passé devant le notaire d’Usson (AD 42 : 5 E-VT 1150- 18 Me Sigean), fixe les conditions de son futur mariage avec François Carré, maître maçon originaire du village de Chez Latour, paroisse de Lupersat en Combrailles, diocèse de Limoges (Lupersat : département de la Creuse. Le village de Chez Latour se trouve sur la route d’Aubusson à Auzances): « lesdites parties ont dit avoir conclu de faire mariage.... lequel s’accomplira Dieu le permettant... »

La dot de Gabrielle Verdier se compose de la somme de 40 livres, d’un lit et d’un coffre garni de ses habits et de son menu linge. De plus, le futur époux, « voulant donner des marques d’amitié et d’affection qu’il a pour sadite future épouse lui donne la somme de 60 livres au cas où elle lui survive » . Parmi les témoins figure Michel Carré, lui aussi maître maçon, habitant au Trémolet , qui a, peut-être, un lien de parenté avec le futur époux.

Cependant, à la suite de ce contrat, il ne semble pas y avoir eu de mariage à l’église d’Usson, les registres paroissiaux n’en font pas mention. Le contrat a-t-il été rompu ? Le futur époux est-il décédé peu après le contrat ? Le mariage a-t-il eu lieu ailleurs ?

En second lieu, un marchand de bateaux

Quatre ans après, le 29 août 1748, Philibert Thély, veuf, marchand au port de Saint-Rambert, épouse, dans l’église d’Usson, Gabrielle Verdier qui, elle, n’est pas dite veuve, ce qui laisserait penser que son premier mariage n’a peut-être pas eu lieu. Pour ce second mariage, un contrat est passé (AD 42 : 5 E- VT 1150- 18 Me Sigean) et l’époux « voulant donner à ladite Gabrielle Verdier des marques de l’amitié et l’affection qu’il a pour elle, lui donne 99 livres 19 sols, au cas où elle lui survive. »

Mais cette alliance ne sera pas de longue durée car, moins d’un an après, le 27 mai 1749, un acte de sépulture dans les registres paroissiaux de Neulise, retranscrit sur le registre d’Usson le 2 juin, signale le décès de Philibert Thély, âgé de 30 à 35 ans, charpentier en bateaux :

« Etant en voyage, a resté malade dans le village de Flandres, à Neulise en Forest, où il a reçu les sacrements, est décédé le 27 mai 1749, enterré le lendemain au cimetière de Neulise. » Parmi les témoins, un autre charpentier, de Saint-Rambert, Antoine Poncet.

Puis un artiste peintre lyonnais

Deux ans sont passés et, le 15 novembre 1751, est célébré, à l’église d’Usson, le mariage de Gabrielle Verdier et de Mathieu Baugat, maître peintre, originaire de Lyon mais habitant Usson ...


Gayard, un hameau retrouvé

La commune d'Usson est très étendue. Elle a sur son territoire une cinquantaine de hameaux appelés autrefois villages; le chef-lieu était dit le bourg. Il est intéressant de comparer la carte de Cassini du XVIIIème siècle avec une carte d'échelle proche actuelle. On constate que des villages ont changé partiellement de nom. D'autres ont disparu dont celui qui fait l'objet de cette étude, Gayard.

Extrait de la Carte de Cassini

Carte villages Usson-en-forez


On peut voir que Gayard se situait alors « côté d'Auvergne », proche de Salayes, Boffet et Le Faveyrial. Aujourd'hui, il ne resterait plus rien de ce village, ni ruine ni souvenir, ce qui paraît surprenant. Mais il est vrai qu'un village peut disparaître rapidement. L'exemple de Félines, hameau disparu au XXème siècle, le montre.



Etape 1 Les taillables

En 1709, Jacques May, fermier de la rente d'Usson, demande pour raison de cens contre Jean Bost tuteur des enfants de Vital Varagnat, Antoine Gonnet l'aîné, Antoine Gonnet le jeune, André Février, Benoît Truchard, laboureurs du village de Salayes, et Jean Chastaing, laboureur du Faveyrial.

Aux Archives Départementales du Puy de Dôme, le Rôle de la taille (AD63 B IS 1073) confirme la présence de Gayard et nous donne le nom des taillables de ce village. Nous y trouvons:

en 1721

en 1722

L' état civil nous donne les mariages suivants:
25 octobre 1689 Gounet Pierre de Salayes x Lanier Antoinette de Lair
11 août 1699 Truchard Benoît (fils de Blaise et Marguerite Chabrier) de Salayes x Boureille Benoîte de La Borie
22 février 1708 Bost Jean de Lissac x Varagnat Françoise (fille de +Vital et Marguerite Gayard) de Salayes
02 octobre 1708 Gounet Antoine de Salayes x Robert Catherine de La Borie ...